« Si je suis vigneron ? C’est un peu impressionnant à dire… »
Réno baigne dans la marmite depuis tout petit, et pourtant. Quand on a un papa qui s’appelle Philippe Pacalet, un cousin du nom de Christophe Pacalet ou encore quand son grand-oncle n’est autre que Marcel Lapierre, il peut au fond s’avérer vertigineux de se définir soi-même comme humble vigneron.
Et c’est tout le sel de la personnalité de Réno : un jeune homme discret aux yeux rieurs, qui observe beaucoup et s’exprime avec un calme presque olympien et qui, pour autant, reste éminemment conscient qu’il a encore tout à prouver. « Le challenge c’est de faire des vins avec mon prénom dessus. Le nom, on le connait bien… ».
S’il est parti dans des études loin du vin (histoire et sciences politiques d’abord, école de commerce ensuite), il a toujours gardé un lien fort au domaine, revenant à chaque vacance, se débrouillant pour être présent à chaque vendange. Une fois diplômé, il revient officiellement, en 2019, pour « voir une année complète ». Il ne repartira pas. Ou plutôt, il décidera, en complicité déclarée avec son père, de lancer sa propre frégate en 2023, dans le sillage du vaisseau amiral : démarrer son propre négoce, trouver ses propres approvisionnements sur d’autres appellations que celle de la Maison Pacalet, pour s’ouvrir l’esprit, et « s’enlever encore un peu plus les œillères » selon ses propres mots.
« On est toujours un éternel élève ! En créant ma propre société je m’oblige en quelque sorte à tout faire de A à Z, j’apprends beaucoup. » La Bourgogne reste le cœur du projet, « Ce sont mes racines, et puis j’ai à cœur de produire un vin qui reste un simple produit de la terre. » Entendez : si Réno se régale de dénicher de superbes terroirs avec des vignes travaillées dans le respect du vivant, il a posé dans son cahier des charges de pouvoir réaliser des cuvées à des tarifs encore accessibles. « Il faut que ça puisse être consommé. Je veux pouvoir en vivre et payer toutes les factures, mais que ça reste raisonnable ». Un engagement loin d’être évident, surtout quand on découvre le jusqu’au boutisme de sa démarche : « Ce qui m’intéresse c’est de respecter le raisin entier, et de s’affranchir de toute technologie. » Pas de table de tri ou de girafe chez Réno, et une politique draconienne des intrants : des vinifications 100 % grappes entières et 0 % sulfites, des élevages cuves et vieux fûts. « Bien sûr que j’adorerais un jour avoir un peu de vignes, mais ce n’est pas la priorité. Car pour vraiment faire du très bon travail, il faut beaucoup de temps. Quand je suis dans la nature, ça rappelle à mes cellules d’où je viens, il y a un plaisir immense, déraisonnable presque quand on est en train de tailler, malgré le froid, la fatigue, les douleurs physiques. Et faire le vin, c’est un peu pareil pour moi : faire le vin, c’est vivant. On passe du jus de raisin au vin fini, c’est scientifiquement analysable… mais il y a toujours un côté un peu magique ! »
Entre ancrage et lenteur, entre émerveillement enfantin et douce rigueur, Réno est de ces tous jeunes vignerons qui parviennent à nous reconnecter avec notre curiosité profonde.
Un nom… et surtout un prénom, à suivre de près.
Texte ©Atelier Soubiran / Photo ©Maison Réno